VERS UNE REFORME DES NFT EN DROIT FRANÇAIS ?
Lors de notre précédent article (que nous vous conseillons de lire avant celui-ci) sur la problématique de l’interdiction de la vente des NFT aux ventes volontaires aux enchères publiques en France, nous avions évoqué la réforme de « Modernisation de la régulation du marché de l'art ». Ce mardi 22 février, nous avons regardé avec attention la séance de la deuxième lecture de cette proposition de loi au Sénat avec la présence du ministre de la justice, qui semble bien être un petit pas pour aller vers une réforme plus vaste.
La proposition de loi concerne largement une réforme du Conseil des ventes volontaires, organisme de régulation des commissaires-priseurs « non-judiciaires », dont nous n’évoquerons pas les détails ici. Tout l’intérêt de cette proposition pour les NFT constituait en une modification des biens vendables dans le cadre d’une vente volontaire aux enchères publiques. Ainsi, tous les biens meubles corporels comme incorporels, seront vendables par les opérateurs de ventes volontaires.
Cela peut paraître peu, voire insignifiant, mais l’amendement qui réclame cette modification la loi vise clairement les NFT selon la demande des commissaires-priseurs. En conséquence, la loi reconnaîtra donc implicitement l’équivalence entre la vente d’un tableau XIXe et celle d’un NFT aux enchères.
Durant cette 2e lecture de la proposition de loi, la séance au Sénat a montré une adéquation avec les modifications de l'Assemblée nationale notamment sur les amendements qui nous concerne dans cet article. Cela valide donc la modification du Code de commerce et donne enfin la possibilité de ventes aux enchères volontaires de NFT en France.
Pour la suite, pour faire un petit rappel de droit constitutionnel, la proposition de loi étant adoptée par le Parlement (les deux chambres), le texte sera promulgué par le président de la République (sauf demande de contrôle de constitutionnalité, peu probable en l’espèce). La proposition de loi deviendra alors un texte applicable en opérant alors une réforme du droit des ventes aux enchères publiques.
Il convient de ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué : cette réforme ne change pas fondamentalement le statut juridique et fiscal des NFT (notre article sur la particularité du statut fiscal des NFT). Cependant, chaque début de réforme est une avancée considérable dans la reconnaissance des particularités des jetons non-fongibles.
Adieu la catégorie spéciale « actifs numériques », les NFT doivent et vont finir par devenir des biens meubles comme les autres, et, plus encore, des œuvres d’art au sens juridique du terme.
Au niveau du droit des biens cela semble plus qu’évident, car ils respectent la définition de l’article 528 du Code civil qui dispose que : « sont meubles par leur nature les biens qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre ». Le droit des biens français voit donc les NFT comme des biens meubles incorporels. Pour le droit relatif à la définition d’une œuvre d’art en droit français, il faut se référer au décret n°95-172 du 17 février 1995 « relatif à la définition des biens d'occasion, des œuvres d'art, des objets de collection et d'antiquité ». Celui-ci ne réclame pas une condition de corporalité, ainsi les œuvres numériques, non-physiques par définition, peuvent être considérées comme œuvres d’art. Par simple déduction nous sommes donc en droit de conclure que les NFT peuvent être des œuvres d’art, mais cela s’arrête au niveau fiscal par leur statut spécial d « actif numérique ».
On imagine alors facilement pour ces prochains mois des débats sur une réforme du statut juridique et fiscale des NFT pour enfin les dissocier des crypto monnaies. Cela permettra une meilleure reconnaissance des artistes NFT, mais aussi un environnement fiscal plus juste par rapport aux autres artistes contemporains.